Social
Date de publication : 03/04/2024
Isabelle Prunier
Stanislas Dublineau
En général, lorsqu’un salarié part à la retraite, il peut bénéficier, sous réserve de dispositions plus favorables d’une convention collective ou un accord collectif, d’une indemnité de départ en retraite spécifique, en fonction de son temps de présence chez son employeur. Qu’en est-il pour les professeurs exerçant leur métier dans un IME ? Focus avec nos experts.
Comment calculer les indemnités de départ en retraite des professeurs des écoles agréés travaillant au sein des IME ? Telle est la question qui a été récemment posée à la Cour de cassation.
Pour y répondre, encore faut-il comprendre les modalités de rémunération des professeurs des écoles agréés qui exercent au sein d’un IME.
La rémunération de ces enseignants comprend le traitement versé par l’éducation nationale et un salaire versé par l’IME lié aux activités complémentaires réalisées (études surveillées, etc…).
Avant la loi du 5 janvier 2005, dite loi CENSI, le statut des maîtres de l’enseignement privé était difficile à cerner, et des disparités existaient entre ces enseignants et ceux de l’enseignement public, notamment en matière de droit à la retraite.
La loi CENSI a aligné le statut des maîtres agréés de l’enseignement privé à celui des agents du public. Depuis l’adoption de cette loi, les maîtres agréés qui interviennent dans un établissement privé sous contrat simple avec l’Etat bénéficient d’un régime additionnel de retraite. Ce régime leur permet d’obtenir une retraite complémentaire de l’Education Nationale, afin qu’ils ne soient pas défavorisés par rapport aux enseignants du public.
En contrepartie de la création d’un régime additionnel de retraite, la loi CENSI a supprimé de manière progressive l’indemnité de départ à la retraite dont les maîtres agréés bénéficiaient. Un régime transitoire a été mis en place pour que cette suppression intervienne de manière proportionnelle à l’évolution des pensions de retraite.
Des enseignants ont estimé qu’ils pouvaient, malgré les dispositions de la loi CENSI, percevoir l’indemnité de départ en retraite prévue par l’article 18 de la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, non seulement au regard du perçu au sein de l’établissement privé, mais aussi sur le traitement perçu de l’Etat.
Ils ont principalement soutenu qu’ils ne pouvaient être exclus des dispositions de la convention collective applicable au sein des établissements dans lequel ils ont travaillé. Ils ont également considéré que les dispositions de la convention collective ne faisaient aucune exclusion concernant leur traitement versé par l’Etat. Ils ont dès lors prétendu que les dispositions de la loi CENSI n’étaient pas de nature à les priver d’un droit reconnu conventionnellement.
A tort selon la Cour de cassation qui a clairement précisé dans un arrêt rendu le 17 janvier 2024 (n°22-16.016) que :
« Les maîtres agréés exerçant dans un établissement d’enseignement privé lié à l’Etat par contrat simple, bénéficiaires de la retraite additionnelle de la fonction publique instaurée par l’article 3 de la loi du 5 janvier 2005 précitée, ne sont pas en droit de percevoir également l’indemnité de départ à la retraite prévue par l’article 18 de la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 ».
Cette décision -qui reprend le principe posé par un arrêt rendu par la Haute Cour le 28 juin 2023 (n°21-20.251)- est pleinement conforme à l’esprit de loi CENSI.
Elle est également salutaire pour les établissements privés qui accueillent des professeurs des écoles agréés car une position inverse aurait largement compromis les finances d’établissements dont l’importance n’est plus à démontrer.
Isabelle Prunier
Expert-comptable, responsable régionale ESS Ile-de-France