Juridique
Date de publication : 13/04/2023
Christian Serpaud
Les pouvoirs publics (État, communes, départements, régions, établissements publics…) et les associations peuvent nouer différentes formes de relations contractuelles. Ces dernières peuvent prendre la forme de contrats de la commande publique (marché public et délégation de service public, notamment) ou consister en l’octroi de subventions. Les obligations et les droits des parties variant selon le type de conventions conclues, il nous a semblé intéressant de revenir sur le sujet par un jeu de questions-réponses.
Afin de distinguer les contrats de la commande publique des subventions, il convient de déterminer la structure à l’origine du projet (l’émetteur).
Ainsi, dans le cadre des contrats de la commande publique, c’est la collectivité publique (État, commune, département…) qui définit le besoin qu’elle veut satisfaire (achat de matériels, travaux à effectuer…) ou le service qu’elle souhaite confier en gestion à un tiers (centre de loisirs, crèche, musée…). La collectivité publique pouvant alors recourir notamment à un marché public ou à une délégation de service public (DSP).
Les subventions sont, quant à elles, des contributions de toute nature (versement d’une somme d’argent, prêt de matériel ou de locaux, mise à disposition d’agents, etc.), octroyées, sans contrepartie directe, par les pouvoirs publics à une association, afin de l’aider soit à réaliser une action ou un projet d’investissement, soit à contribuer au développement de ses activités ou à son financement global.
Elles servent donc à financer des activités, des actions ou des projets que l’association a elle-même initiés, définis et mis en œuvre. D’ailleurs, il ressort clairement de la loi relative à l’économie sociale et solidaire du 31 juillet 2014 que les subventions « ne peuvent constituer la rémunération de prestations individualisées répondant aux besoins des autorités ou organismes qui les accordent ».
Un marché public est un contrat qu’une personne publique conclut avec une structure privée (entreprise, association…) pour répondre à ses besoins en matière de travaux, de fournitures de biens ou de services (réfection de façades, achat de matériels informatiques, fourniture de repas, nettoyage de locaux, entretien d’espaces verts, etc.).
Une délégation de service public, quant à elle, permet à une collectivité publique de confier à un tiers la gestion d’une activité qu’elle a elle-même créée (musée, lieu d’exposition, cinéma, village de vacances, enceinte sportive, assainissement collectif et gestion des eaux pluviales, fourrière et refuge pour animaux…).
En effet, un marché public est conclu entre une collectivité publique et une association en contrepartie d’un prix ou de tout équivalent. Autrement dit, l’association fournit des biens ou exécute une prestation de services et, en échange, reçoit un paiement de la part de l’acheteur public. L’association ne supporte ici aucun risque financier.
En revanche, si la rémunération de l’association n’est pas garantie mais est substantiellement liée aux résultats de l’exploitation du service qui lui a été confié (billets d’entrée au musée ou au cinéma, recettes d’un bar ou d’un restaurant, etc.), ce n’est pas un marché public mais une délégation de service public. En effet, dans une délégation de service public, le risque lié à l’exploitation du service est transféré de la collectivité publique à l’association délégataire.
Rien n’interdit à une association qui perçoit des subventions de se porter candidate à l’attribution d’un marché public. Néanmoins, puisque la collectivité publique qui choisit la structure à laquelle elle va confier un marché public met en concurrence les candidats, l’octroi de subventions à une association candidate ne doit pas fausser cette concurrence.
Ainsi, le prix proposé par l’association pour la réalisation du marché public doit être déterminé en prenant en compte l’ensemble des coûts directs et indirects qui y sont liés, exclusion faite des subventions perçues. Agir autrement reviendrait à accorder un avantage à l’association subventionnée puisqu’elle serait alors en mesure de pratiquer des prix plus bas que les autres candidats. Ce qui fausserait les conditions de la concurrence.
De même, une association qui gère une délégation de service public peut recevoir des subventions. Toutefois, pour que ce contrat reste une délégation de service public, les subventions ne doivent pas faire disparaître l’aléa financier lié à l’exploitation du service, qui est un critère essentiel pour caractériser une délégation de service public. Autrement dit, les subventions ne doivent pas constituer une garantie d’équilibre financier pour l’association.
Pour obtenir un marché public ou une délégation de service public, les associations doivent répondre aux annonces publiées par les collectivités publiques. Des annonces diffusées dans les journaux ou sur des plates-formes en ligne (PLACE pour les achats de l’État www.marches-publics.gouv.fr, sites des communes, APProch https://projets-achats.marches-publics.gouv.fr/, le marché de l’inclusion https://lemarche.inclusion.beta.gouv.fr, etc.).
Quant aux subventions, elles sont demandées directement aux pouvoirs publics susceptibles de les attribuer soit spontanément, soit en réponse à un appel à projets.
En pratique, les demandes de subventions de fonctionnement adressées à l’État, à une collectivité territoriale, à un établissement public administratif ou à caractère industriel et commercial, à un organisme de Sécurité sociale ou à un autre organisme chargé de la gestion d’un service public administratif doivent être effectuées au moyen du formulaire Cerfa n° 12156*05.
Pour certains dispositifs, les associations peuvent transmettre leurs demandes de subventions en ligne via leur Compte Asso (Fonds pour le développement de la vie associative, soutien aux associations agréées Jeunesse et éducation populaire…) ou via le site de l’organisme (par exemple, le portail Dauphin pour l’Agence nationale de la cohésion des territoires).
Les principes de libre concurrence et de liberté d’entreprendre sur lesquels est basée l’Union européenne interdisent que les entreprises bénéficient d’aides publiques. Étant précisé que la notion d’entreprise se réfère à une structure qui exerce une activité économique (offre de biens et de services sur un marché donné), quel que soit son statut juridique, et donc concerne aussi bien les entreprises commerciales que les associations.
Afin de permettre aux États d’octroyer quand même des aides à certaines entreprises exerçant des activités marchandes visant à satisfaire l’intérêt général, l’Union européenne a créé la notion de « service d’intérêt économique général » (SIEG). Une notion qui recouvre de nombreux domaines d’activité (santé, logement social, gestion des réseaux de l’eau, transports, culture, établissement pour personnes âgées, accueil de jeunes enfants, etc.).
Il appartient aux collectivités publiques (État, régions, départements, communes, etc.), dans leurs champs de compétences respectifs, de qualifier un service de SIEG. Ce qui leur permet ensuite d’accorder des aides financières ou en nature (dites « compensations ») à l’association qui en a la charge. Ces compensations doivent être officialisées dans un « mandat » écrit et se concrétisent soit dans un marché public ou une délégation de service public si le projet est né à l’initiative de la collectivité publique, soit dans une convention pluriannuelle si ce projet a été initié par l’association.
Christian Serpaud
Expert-comptable, commissaire aux comptes, associé, directeur national ESS
Christian est associé au sein du cabinet In Extenso. Expert-comptable et commissaire aux comptes spécialiste du secteur associatif et ESS, il est en charge du Marché Economie Sociale du groupe In Extenso.