Gestion
Date de publication : 21/10/2024
Laurent Simo
Le terme d’externalisation peut parfois être considéré comme malsain, par assimilation à la notion de délocalisation. Au sein du secteur associatif, il est souvent ressenti comme antinomique avec la vocation sociale que doit porter le modèle de l’économie sociale et synonyme d’une perte de compétences.
Et pourtant, l’externalisation comporte beaucoup d’avantages….
Avant tout, l’externalisation consiste à confier à des prestataires externes un ensemble de tâches, le plus souvent liés à des fonctions « supports », tout en conservant la maitrise de ses activités et de ses projets.
Il est fréquent que la réflexion sur l’externalisation soit consécutive d’un dysfonctionnement interne : découverte d’erreurs, absence d’un salarié, surcoût financier, retards, difficultés de recrutement…
Elle peut également s’inscrire dans une démarche de recherche d’adaptabilité ou visant à améliorer la performance de la structure. Elle constitue dans tous les cas un réel changement dans les méthodes de travail : elle doit donc s’anticiper et ne pas être subie.
L’avantage le plus significatif réside dans la professionnalisation de certaines fonctions qui ne constituent pas le cœur de métier de l’entité et qui sont cependant essentielles à son bon fonctionnement : comptabilité, gestion de la paie, informatique, secrétariat, etc…
L’objectif est bien de recourir à des compétences spécifiques pour garantir la fiabilité de ces services afin de se recentrer sur la mise en place et le suivi de ses projets.
Globalement, l’externalisation comporte de nombreux enjeux positifs :
Le recours à un prestataire externe permet d’obtenir l’expertise nécessaire dans le domaine d’activités délégué. En cas de besoin, le prestataire pourra proposer des services complémentaires car il est spécialiste dans son champ d’action. Il sera en mesure de répondre rapidement à la demande sans nécessiter une recherche longue, fastidieuse et incertaine.
Externaliser, signifie également confier la responsabilité du service délégué auprès du prestataire. Celui-ci doit garantir la fiabilité et surtout la continuité de la prestation avec sa propre équipe. Il doit ainsi assurer les remplacements, le suivi, les formations,… ce qui est plus difficile à réaliser avec un salarié en interne, souvent isolé, parfois en temps partiel, et encore d’avantage lorsqu’il faut pallier un départ ou un arrêt de longue durée.
Selon l’évolution de l’activité, des besoins et des ressources disponibles, le contrat de prestation peut être aménagé et adapté, soit en réduisant la prestation en cas de diminution d’activités, soit en sollicitant des tâches complémentaires en cas de surcroît temporaire.
Spécialisé dans son domaine de compétence, le prestataire exerce une veille constante afin d’appliquer les modifications légales et réglementaires. Il permet par exemple d’optimiser les charges fiscales ou d’éviter des erreurs de taux de charges sociales.
La gestion des services supports au sein d’une structure implique la mise à disposition de moyens logistiques et administratifs : bureaux, ordinateurs, logiciels, matériel administratif, etc …
La délégation à un prestataire réduit certaines de ces contraintes logistiques et garantit la mise à niveau permanente des outils informatiques. En outre, l’externalisation doit permettre de recentrer sur le prestataire des fonctions « généralistes » afin de libérer la direction opérationnelle de tâches non productives et lui permettre de se consacrer à son cœur de compétence.
Des prestataires extérieurs interviennent dans d’autres structures similaires à la vôtre. Ils sont donc en mesure d’effectuer des comparaisons, de repérer les meilleurs pratiques et par conséquent d’apporter des conseils pertinents sur votre organisation, vos processus et vos stratégies d’évolution. Ils doivent être porteurs de valeur ajoutée.
Il est souvent imaginé que le recours à un prestataire impliquera un surcoût significatif par rapport à la présence d’un salarié en interne … pas si sûr. En effet, pour pouvoir être comparés, c’est bien l’ensemble des coûts relatifs à la présence d’une personne permanente qui doivent être pris en compte : le coût salarial bien sûr, mais aussi l’occupation de l’espace (bureau, charges liées), le matériel nécessaire, la formation, la documentation, la gestion administrative du personnel et le recours déjà existant à des experts.
Le suivi externalisé doit aussi permettre de réduire une partie de coûts « cachés » ou exceptionnels : redressement fiscal, pénalités suite à un contrôle URSSAF, pannes informatiques, blocage des activités suite à une absence, etc …
La relation avec un prestataire externe est forcément différente. Toutefois, les intervenants peuvent aussi faire part d’une réelle implication et trouver leur place au sein des équipes salariés. L’identification du prestataire pourra ainsi s’effectuer en fonction des attendus relationnels en privilégiant un service de proximité par exemple.
Une crainte est de ne pas obtenir la réponse immédiatement à une question donnée en l’absence de ressource interne permanente. Et pourtant, il s’agit le plus souvent d’un paradoxe lié à une organisation inadaptée. En effet, l’objectif des services supports est de pouvoir donner accès aux dirigeants les informations dont ils ont besoin : la mise à disposition des éléments nécessaires au bon pilotage d’une structure constitue une nécessité, sans attendre la survenance du besoin et de la sollicitation.
Or, la bonne définition des attendus – en termes de dates, de documents, de commentaires – avec un prestataire externe doit permettre justement d’organiser la transmission et la centralisation des informations. Pour cela, les technologies numériques utilisées par un prestataire peuvent constituer une aide précieuse et des solutions peu explorées jusqu’alors (hébergement de serveurs, portails internet, etc.)
Le choix de l’externalisation d’une partie de ses services supports est fréquemment assumé par des structures commerciales, il l’est plus rarement au sein du secteur non marchand.
Pourtant, le contexte économique et l’organisation à ce secteur constituent des facteurs favorables à ce mode de fonctionnement.
Le secteur associatif fait face à de nombreuses incertitudes concernant ses modes de financement : stabilisation voire diminution des fonds publics, contexte économique peu favorable pour la perception de dons et de mécénat, précarité des cotisations et des inscriptions des usagers aux activités, mise en œuvre de projets exceptionnels sur une durée courte…
Les variations peuvent ainsi s’avérer significatives d’une année sur l’autre avec peu de leviers d’ajustements. Les services administratifs internes se retrouvent alors d’une taille inadaptée aux besoins (insuffisants ou trop importants).
La possibilité de modularité d’une prestation externe constitue ainsi une variable d’ajustement non négligeable dans cette situation.
En dehors des organisations de taille très importante ayant des services administratifs internes structurés, beaucoup d’associations de taille intermédiaire assurent leur gestion avec un(e) comptable à temps partiel, un poste de direction faisant office de service informatique, des responsables d’activités effectuant leur propre secrétariat, etc. Elles se retrouvent constamment à rechercher le « mouton à 5 pattes » qui pourra assumer toutes ses fonctions.
En outre, la présence fréquente de salariés à temps partiel dans les secteurs administratifs peut apporter une part de complexité : présence intermittente, gestion des surcroîts de travail, organisation des tâches.
La spécificité des associations réside dans la présence de multiples interlocuteurs : dirigeants du Conseil d’Administration, personnel salarié, membres, bénévoles, financeurs, partenaires sont autant de personnes ayant besoin d’informations pertinentes sur la gestion de l’entité. La bonne organisation de la circulation de l’information et la nécessité de synergie entre ces acteurs concentrent des impératifs forts pour les services administratifs.
Un prestataire externe peut répondre à ces besoins par la mise en place d’outils informatiques partagés (cf. exemple infra) et la définition de documents synthétiques et pertinents utilisables par le plus grand nombre. Son regard « extérieur » peut aussi constituer une manière d’aborder des problèmes de fonds parfois difficiles à débattre dans un circuit plus fermé.
L’augmentation des contraintes administratives au sein du secteur associatif est une réalité et s’exprime par des formes diverses : justification des financements, niveau d’exigence des usagers, transparence financière, renouvellement des agréments, fiscalité, évolution des lois et règlements, etc.
Ces différents domaines nécessitent des expertises techniques spécifiques qu’un conseil extérieur pourra apporter.
Certains secteurs sont en forte tension sur le recrutement : ce qui est le cas pour des fonctions opérationnelles (aides à domicile, animateur, …) l’est également pour des fonctions administratives (comptable, gestionnaire de paie, …). Les candidats ont souvent tendance à rejoindre des sociétés spécialisées dans leur cœur de métier et le recrutement de ce type de profil peut parfois devenir un vrai parcours du combattant.
L’externalisation est une démarche à inscrire sur du long terme. Elle doit constituer une réflexion élargie non seulement sur les fonctions internes actuelles, mais aussi et surtout sur les besoins futurs. Elle doit permettre de concevoir les services attendus d’ici 3 à 5 ans, en lien avec une réelle vision stratégique du développement du projet associatif.
Ainsi, les choix doivent se réaliser selon une méthodologie précise afin d’en garantir le succès :
Laurent Simo
Expert-comptable, commissaire aux comptes, associé, directeur national ESS
Laurent est associé au sein du cabinet In Extenso. Expert-comptable et commissaire aux comptes spécialiste du secteur associatif et ESS, il est en charge du Marché Economie Sociale du groupe In Extenso.