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Social

Prévenir les risques professionnels dans les associations

Date de publication : 24/01/2025

#Article

Laurent Simo

En tant qu’employeur, les associations sont tenues à une obligation de sécurité envers leurs salariés. À ce titre, elles doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer leur sécurité et protéger leur santé physique et mentale. Comment prévenir les risques professionnels dans les associations ?

Concrètement, cette obligation de sécurité passe notamment par l’identification des risques professionnels, le respect de la règlementation, l’aménagement adéquat des postes de travail, une organisation du travail appropriée, la mise en place d’outils de protection collective (garde-corps, arrêt automatique des machines…), la fourniture d’outils adaptés et d’équipements de protection individuelle (gants, masques, lunettes, chaussures de sécurité, casques antibruit…), la prévention du harcèlement moral et sexuel, des actions d’information et le suivi de formations.

Établir un document unique d’évaluation des risques professionnels

Afin de mettre en place les mesures adéquates pour protéger la santé et la sécurité de leurs salariés, les associations doivent, dès l’embauche de leur premier salarié et quel que soit leur secteur d’activité, évaluer les risques existants dans leur(s) établissement(s) au vu de leurs activités.

Cette évaluation consiste à :

  • identifier les dangers : escaliers, conduite d’un véhicule, utilisation de produits chimiques, machines, outils, sol glissant, fréquentation de personnes fragiles ou agressives, mobilisation de personnes dépendantes, éclairage insuffisant, position debout prolongée, bruit, chaleur, froid, épidémies, port de charges lourdes, travail de nuit, horaires décalés, travail sur écran, appareils électriques, etc. 
  • et analyser les risques liés à ces dangers pour les salariés au vu de leurs conditions d’exposition (chutes, lombalgies, coupures, fatigue visuelle, stress post-traumatique, tendinites, décès, etc.)

Les associations doivent transcrire les résultats de cette évaluation des risques dans un « document unique d’évaluation des risques professionnels » (DUERP).

Une fois établi, le DUERP doit être mis à la disposition notamment des salariés, des ex-salariés, des membres du comité social et économique, de l’inspection du travail ou de la médecine du travail. Dans cette optique, l’employeur doit afficher les règles de consultation de ce document à une place convenable et aisément accessible dans les lieux de travail, au même emplacement que le règlement intérieur, pour les associations qui en sont dotées.

Le DUERP doit être mis à jour :

  • lors de toute décision d’aménagement modifiant les conditions de travail ou impactant la santé ou la sécurité des salariés (utilisation d’un nouveau produit chimique dangereux, changement d’une machine, modification des cadences de travail, déménagement…) 
  • lorsqu’une information supplémentaire intéressant l’évaluation d’un risque est recueillie (par exemple, apparition de maladies professionnelles) 
  • au moins une fois par an dans les associations d’au moins 11 salariés.

Et attention car ne pas établir ou ne pas mettre à jour le DUERP est passible d’une amende de 7 500 € pour l’association.

Le DUERP, dans ses versions successives, est conservé par l’employeur pendant une période de 40 ans à compter de son élaboration.

Rappel : les salariés exposés à un ou plusieurs des six facteurs de risques professionnels inclus dans le compte professionnel de prévention (bruit, travail de nuit, travail en équipes successives alternantes…) cumulent des points échangeables contre le financement d’une formation ou d’une reconversion professionnelle, d’un passage à temps partiel sans perte de rémunération ou d’un départ anticipé à la retraite. Pour en savoir plus, nous vous invitons à lire notre article sur ce sujet.

Quels risques dans les associations ?

Les risques psychosociaux

Les risques psychosociaux (RPS) peuvent survenir quelle que soit l’activité de l’association et sont susceptibles de concerner tous les salariés.

Ils sont engendrés par :

  • le stress lié au déséquilibre entre la perception qu’un salarié a des contraintes de son environnement de travail et la perception qu’il a de ses propres ressources pour y faire face ; ce stress peut être dû notamment aux conditions et à l’organisation du travail (manque de moyens, manque d’autonomie, horaires décalés, manque de clarté dans le partage des tâches…), à une surcharge de travail ou à un management agressif ou inadapté 
  • des violences internes exercées par des collègues ou des supérieurs hiérarchiques (conflits importants, harcèlement moral ou sexuel…) 
  • des violences externes commises par des tiers à l’association (insultes, menaces ou agressions de la part de résidents, de bénéficiaires, de sous-traitants, de patients, de clients, etc.)

Ces risques peuvent causer des dégâts non seulement physiques (maladies cardio-vasculaires, troubles musculosquelettiques…) mais aussi moraux (dépression, anxiété, suicide…).

Les risques spécifiques à certains secteurs

Outre les risques pouvant survenir dans toutes les associations (RPS, risques liés au travail de bureau, etc.), certains secteurs peuvent être confrontés à des risques particuliers liés à leurs activités.

Ainsi, dans le secteur sanitaire, social et médico-social (établissements accueillant et/ou hébergeant des personnes âgées ou des personnes handicapées, hôpitaux, aide à domicile, etc.), les salariés peuvent être confrontés à des risques engendrés par la manutention répétée de charges et de personnes, l’utilisation de produits chimiques, les déchets dangereux, les sols glissants, les trajets en voiture, les canicules, les épidémies, les horaires atypiques ou encore la fréquentation de personnes pouvant avoir des comportements agressifs.

Ces risques engendrant pour les salariés des troubles musculosquelettiques (douleurs au niveau du bas du dos ou du cou, syndrome du canal carpien, syndrome de la coiffe des rotateurs…), des chutes, des allergies, des brûlures, etc.

De leur côté, les associations d’insertion qui font travailler des personnes éloignées de l’emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières (structures de l’insertion par l’activité économique) ou des personnes en situation de handicap (entreprises adaptées) doivent prévenir les risques liés à leurs activités (usinage, menuiserie, travaux forestiers, bâtiment, espaces verts, couture, nettoyage de locaux, cuisine, recyclerie, etc.). Ces structures doivent également prévenir certains risques liés aux situations difficiles pouvant être engendrées par les particularités de leurs salariés et bénéficiaires (addictions, santé fragile, troubles du comportement, disputes, violences physiques, agressions verbales…).

Prévenir le harcèlement sexuel et le harcèlement moral

Les associations doivent protéger leurs salariés contre le harcèlement sexuel et le harcèlement moral, quel que soit leur auteur (collègue, supérieur hiérarchique, dirigeant de l’association, sous-traitant, client, patient, bénéficiaire, etc.). Pour cela, elles doivent évaluer le risque lié au harcèlement dans leur structure et prendre toutes les mesures nécessaires pour l’empêcher.

Le Code du travail définit le harcèlement moral comme des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Constituent de tels actes les nombreuses brimades, critiques injustifiées, menaces, insultes ou humiliations infligées à un salarié, son isolement ou sa mise à l’écart (installation dans un bureau sans aération, exclusion des réunions techniques, refus de communication…), la privation des moyens matériels nécessaires à l’accomplissement de son travail (absence de bureau, d’ordinateur, de téléphone…) ou encore la multiplication de sanctions injustifiées.

Quant au harcèlement sexuel, il est constitué par :

  • des propos ou des comportements à connotation sexuelle ou sexiste répétés qui, soit portent atteinte à la dignité de la personne en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante (propositions sexuelles insistantes, blagues salaces, gestes déplacés, etc.) 
  • des propos ou des comportements imposés à une seule victime par plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’instigation de l’une d’elles, et ce même si chaque personne n’a pas agi de manière répétée 
  • des propos ou des comportements imposés à une même victime, successivement, par plusieurs personnes qui, même en l’absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition 
  • toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers (chantage sexuel lié à l’obtention d’un emploi ou d’une augmentation, par exemple).

L’employeur doit informer les salariés du texte des articles 222-33 et 222-33-2 du Code pénal prévoyant les sanctions pénales applicables aux auteurs de harcèlement sexuel et de harcèlement moral. Il doit également insérer dans le règlement intérieur les dispositions du Code du travail en matière de harcèlement moral et de harcèlement sexuel.

En pratique : l’employeur peut sensibiliser et former ses salariés au harcèlement moral et sexuel afin de les aider à comprendre, identifier et prévenir les situations de harcèlement sexuel. Il peut également, pour prévenir le harcèlement moral, anticiper les situations pouvant générer du stress (changement d’organisation, arrivée de nouveaux collaborateurs…), être attentif aux comportements inhabituels (absences répétées, repli sur soi, baisse de la qualité du travail, etc.), vérifier les correspondances professionnelles entre salariés (pour y détecter d’éventuels conflits) ou encore réagir immédiatement et avec fermeté à tout écart de comportement (un mail dénigrant, par exemple). Concernant le harcèlement sexuel, Il peut notamment aménager les locaux de travail (portes vitrées à mi-hauteur dans les bureaux, couloirs bien éclairés et sans recoins…) pour éviter l’isolement des salariés et constituer les équipes de travail en fonction du profil des employés.

Bénéficier de subventions de l’Assurance Maladie

La subvention « prévention des risques ergonomiques »

Le Fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle accorde des subventions aux associations relevant du régime général de la Sécurité sociale, quels que soient leur activité et leur effectif, qui mettent en place des actions pour réduire l’exposition de leurs salariés :

  • aux manutentions manuelles de charges définies comme toutes les opérations de transport ou de soutien d’une charge (levage, pose, poussée, traction, port, déplacement…), qui exigent l’effort physique d’un ou de plusieurs travailleurs ;
  • aux postures pénibles, soit les positions forcées des articulations ;
  • aux vibrations mécaniques transmises aux mains et aux bras ou à l’ensemble du corps.

Avec cette subvention, les associations peuvent financer :

  • des actions de prévention (diagnostics ergonomiques et formations) et des actions de sensibilisation aux facteurs de risques ;
  • des aménagements de postes de travail proposés par le médecin du travail dans le cadre d’une démarche de Prévention de la désinsertion professionnelle ;
  • les frais de personnel dédiés à la mise en œuvre d’actions financées par le fonds.

Elles peuvent aussi financer :

  • des équipements de transfert : lève-personnes sur rails (configuration en H) en établissements sanitaires ou médico-sociaux avec moteurs et harnais, potences de levage fixes, portiques et ponts roulants, palonniers, préhenseurs, tubes de levage… ;
  • des équipements roulants : transpalettes électriques, tracteurs pousseurs et timons électriques, roues motorisées, diables monte-escaliers électriques, brouettes électriques ;
  • des plans de travail réglables en hauteur : tables élévatrices motorisées, plates-formes à maçonner et recettes à matériaux ;
  • des équipements spécifiques à certains métiers : filmeuses housseuses, ponts de carrossier pour véhicules légers, systèmes de bâchage/débâchage automatiques de bennes, auto-laveuses compactes, démonte-pneus et lève-roues, lave-verres avec osmoseur, etc.

À savoir : le montant de la subvention s’élève à 70 % des investissements réalisés dans la limite de 25 000 € par type d’investissement et de 75 000 € par association jusqu’à fin 2027 (25 000 € pour celles d’au moins 200 salariés). Pour les frais de personnel, le plafond est fixé à un forfait de 8 235 €. Les associations effectuent leur demande de subvention en ligne via leur compte entreprise sur le site net-entreprises.fr

La subvention « RPS Accompagnement »

Afin de prévenir les RPS, les associations de moins de 50 salariés peuvent demander à l’Assurance Maladie la subvention « RPS Accompagnement » qui leur permet d’être assisté par un consultant dans la mise en œuvre d’une démarche de prévention. Le montant de cette subvention, plafonné à 25 000 €, correspond à 70 % du montant (hors taxes) des sommes engagées pour les prestations d’accompagnement.

Le demande de subvention s’effectue en ligne via le compte entreprise de l’association sur le site net-entreprises.fr.

Une obligation de négocier dans les associations d’au moins 50 salariés

Les associations d’au moins 50 salariés doivent être couvertes par un accord collectif ou un plan d’actions, conclu pour 3 ans maximum, en faveur de la prévention dès lors qu’elles remplissent l’une des deux conditions suivantes :

  • au moins 25 % de salariés déclarés au titre du compte professionnel de prévention ;
  • un indice de sinistralité au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles supérieur à un seuil de 0,25 (nombre des accidents du travail et maladies professionnelles sur les 3 dernières années divisé par l’effectif de l’association de la dernière année connue).

Les accords en faveur de la prévention concernent les dix facteurs de risques suivants : le travail de nuit, le travail répétitif, le travail en équipes successives alternantes, les activités exercées en milieu hyperbare, les températures extrêmes, le bruit, les agents chimiques dangereux, les postures pénibles, les vibrations et les manutentions manuelles de charges.

L’accord ou le plan d’actions doit traiter au moins deux des points suivants :

  • l’adaptation et l’aménagement du poste de travail ;
  • la réduction des polyexpositions aux facteurs de risque au-delà des seuils prévus ;
  • la réduction des expositions aux facteurs de risque.

Il doit également aborder au moins deux de ces thèmes :

  • l’amélioration des conditions de travail, notamment sur le plan organisationnel ;
  • le développement des compétences et des qualifications ;
  • l’aménagement des fins de carrière ;
  • le maintien en activité des salariés exposés aux dix facteurs de risques concernés.

À noter : les associations dont l’effectif est compris entre 50 et 300 salariés, qui sont couvertes par un accord de branche étendu comprenant les thèmes obligatoires, n’ont pas l’obligation de conclure un accord.

Auteur(s) :

Laurent Simo

Expert-comptable, commissaire aux comptes, associé, directeur national ESS

Laurent est associé au sein du cabinet In Extenso. Expert-comptable et commissaire aux comptes spécialiste du secteur associatif et ESS, il est en charge du Marché Economie Sociale du groupe In Extenso.

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