Audit - CAC
Date de publication : 03/04/2024
Philippe Guay
Souvent confondu avec l’expert-comptable, le commissaire aux comptes joue un rôle crucial dans l’organisation et le fonctionnement d’une association. En plus de réaliser des audits et la certification des comptes, il prévient des éventuelles difficultés. Retrouvez tous les détails quant aux missions du commissaire aux comptes ainsi que les spécificités liées à sa nomination dans cet article.
Contrairement à l’expert-comptable, le commissaire aux comptes (CAC) intervient le plus souvent dans les associations à partir du moment où les textes le rendent obligatoire. C’est-à-dire lorsque l’activité de l’organisme dépasse certains seuils qui exigent la nomination d’un commissaire aux comptes.
Les commissaires aux comptes exercent une profession légale reconnue par l’Etat et les pouvoirs publics. C’est une profession réglementée et pour exercer cette profession, il faut être titulaire d’un diplôme d’expertise-comptable ou d’un Certificat d’aptitude aux fonctions de commissaire aux comptes (CAFCAC).
L’exercice de la profession de commissaire aux comptes est placé sous la tutelle et le contrôle du ministre de la Justice. Selon les chiffres publiés par la CNCC (Compagnie nationale des commissaires aux comptes), le nombre de professionnels inscrits en 2021 est de 11.245 au niveau national. A ce jour, la profession s’appuie sur la présence de 17 conseils régionaux qui bien souvent se situent dans les mêmes villes que les différentes cours d’appel régionales, en métropole et en Outre-mer.
La profession de commissaire aux comptes peut être exercée individuellement ou sous forme de société (plus de 6.000 sociétés de commissaires aux comptes).
Le législateur ayant confié de nombreuses missions de certification auprès de différents organismes sans but lucratif, ce secteur fait l’objet d’une commission professionnelle spécifique au sein de la CNCC qui recense plus de 28.000 mandats auprès des associations, fondations et fonds de dotation, entre autres.
Parmi les organismes cités, 25.000 établissent des comptes clos au 31 décembre (année civile) et plus de 1.000 font appel à la générosité du public. Enfin, une bonne centaine de mandat fait l’objet d’une certification de comptes combinés qui représentent des groupes associatifs publiant leurs comptes.
La couverture économique du secteur associatif audité par les commissaires aux comptes concerne les entités les plus représentatives de ce secteur. Cela conforte les ministères et les différentes collectivités territoriales qui sont particulièrement attachés au contrôle des structures les plus employeuses et les plus consommatrices de financements publics. L’ensemble des entités faisant l’objet d’un contrôle par un commissaire aux comptes emploie près des trois quarts de l’effectif salarié du secteur associatif en France.
L’activité du commissaire aux comptes est une mission légale et pour l’exercer, le professionnel doit respecter les dispositions d’un code de déontologie qui, lui-même, renvoie à l’application d’un référentiel normatif inscrit au Code de commerce. L’exercice de la mission du commissaire aux comptes exige un comportement réservé car ce dernier a accès à des informations confidentielles. Autant dire que celui-ci est soumis au respect d’un secret professionnel strict et exigeant. Comme l’expert-comptable, le commissaire aux comptes doit respecter des obligations relatives à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Ses travaux et son comportement professionnel sont soumis régulièrement à un contrôle qualité, de même qu’à un contrôle disciplinaire qui sont confiés à une autorité publique indépendante dénommée Haute autorité de l’audit (H2A). Créé par la loi de sécurité financière du 1er août 2003, la Haute autorité de l’audit (H2A) est l’autorité de régulation de la profession de commissaire aux comptes en France.
Dans l’exercice de sa mission, le commissaire aux comptes sera parfois amené à avoir des relations avec le système judiciaire car une de ses obligations exige qu’il révèle tous faits délictueux dont il aura connaissance au procureur de la république du département du siège de l’entité qu’il contrôle.
La procédure de nomination du commissaire aux comptes revêt un caractère plus formel que lorsque l’association contractualise sa relation avec l’expert-comptable. En effet, le commissaire aux comptes est en général nommé par l’organe délibérant de l’entité sur proposition du conseil d’administration. Bien souvent, l’organe délibérant est l’assemblée générale pour les associations et le conseil d’administration pour les fonds de dotation et fondations.
Dans les organismes sans but lucratif, la nomination du commissaire aux comptes est obligatoire ou volontaire.
Lorsqu’il est nommé, la durée de son mandat porte obligatoirement sur six exercices et il ne lui est pas possible, sauf quelques exceptions rares, de démissionner de son mandat. Comme il n’est pas possible à l’association ou à la fondation de mettre fin à son mandat de façon anticipée. Ces exigences garantissent ainsi son indépendance et confèrent à sa mission l’autorité qui convient au rôle voulu par le législateur. Ces caractéristiques n’empêchent pas que les relations entre le commissaire aux comptes et les dirigeants de l’association ou ses interlocuteurs soient basées sur des relations de confiance et de courtoisie réciproques. La présence du commissaire aux comptes est là pour rassurer et sécuriser les tiers. Tous les tiers. A commencer par les membres et les dirigeants de l’organisme auprès duquel il exerce son mandat.
Les conditions de nomination obligatoire du commissaire aux comptes sont multiples. Cette réglementation « mille-feuille » est certainement l’aboutissement d’un empilement de textes pris au fur et à mesure de circonstances conduites par l’actualité législative et l’évolution des activités et pratiques du secteur associatif de ces dernières années. Quoi qu’il en soit, avant que les souhaits de simplifications portés par différents courants militants soient entendus, il convient de retenir les principales situations suivantes qui conduisent à la nomination d’un commissaire aux comptes :
Nous ne détaillerons pas, ici, le cas particulier des associations cultuelles (loi du 9 décembre 1905) ou cultuelles mixtes (loi du 2 janvier 1907) pour lesquelles le contrôle et la certification des comptes relève d’un véritable parcours du combattant dès lorsqu’elles reçoivent ou non des dons ou avantages en provenance de l’étranger.
En dehors de la nomination obligatoire d’un commissaire aux comptes, certains organismes, associations, unions ou fédérations ont, dans certains cas, pris des dispositions particulières décidant de confier le contrôle et la certification de leurs comptes à un commissaire aux comptes. Et ce, même si l’entité ou ses affiliés présentent des seuils financiers qui n’ont aucunes des caractéristiques évoquées ci-dessus en matière de nomination obligatoire. Ce peut être le cas, par exemple :
La partie la plus connue et la plus visible de la mission du commissaire aux comptes consiste dans la certification de la régularité et de la sincérité des comptes. Cette expression d’opinion formulée dans un rapport présenté à la réunion de l’organe délibérant ponctue le caractère annuel de ses interventions.
Le commissaire aux comptes est un acteur incontournable dans la chaine de confiance du système économique. En certifiant la régularité et la sincérité des comptes, il apporte garantie et protection aux tiers utilisateurs que sont les banques, les financeurs, les fournisseurs, mais également les membres et les dirigeants de l’association.
En outre, le commissaire aux comptes effectuera, dans certains cas, les diligences nécessaires à vérifier l’exécution ou l’existence de conventions particulières qui pourraient exister entre les dirigeants et membres du conseil d’administration et l’association elle-même. Il en établit le rapport auprès de la réunion de l’assemblée générale ou de l’organe délibérant.
Outre la certification des comptes annuels, votre commissaire aux comptes effectue des contrôles imposés par son comportement professionnel. La conclusion de ces contrôles effectués dans le cadre d’autres interventions et missions peuvent le conduire à effectuer auprès de la direction générale, du bureau ou de l’assemblée générale de l’association certains signalement d’irrégularités. Ces signalement, qui ne remettent pas en cause la qualité de l’opinion qu’il a exercée dans son rapport annuel, prennent la forme de recommandations.
Par ailleurs, votre commissaire aux comptes est tenu d’effectuer une vérification de la sincérité et de la concordance avec les comptes annuels des informations comptables et financières qui sont contenues et livrées dans le rapport de gestion du conseil d’administration. Il doit s’exprimer à ce sujet, surtout s’il relève des anomalies ou des points de désaccord qui méritent un signalement de sa part. En général, le sujet aura été évoqué et corrigé avant la tenue de la réunion de l’organe délibérant.
Chaque année, dans le cadre de sa mission d’audit, le commissaire aux comptes, doit mettre en œuvre des obligations relatives à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Cette démarche est rendue obligatoire par l’application de normes professionnelles qui s’inscrivent dans son programme de travail.
Dans l’exercice de sa mission, le commissaire aux comptes peut être amené à prendre connaissance ou découvrir la réalisation de malversations ou faits délictueux commis au sein de l’association. Dans ce cas, il a l’obligation d’en effectuer la révélation au procureur de la République.
Son rôle n’est pas de rechercher expressément la présence de faits délictueux, mais ce n’est que la découverte de ces faits qui doit le conduire à effectuer cette démarche. Il n’a, à ce sujet, pas à apprécier la gravité ni les conséquences du délit. C’est le rôle du procureur de prendre les décisions et suites à donner.
Dans le secteur associatif, les faits délictueux spécifiques sont le plus souvent des conflits d’intérêt, délit de favoritisme, détournement de fonds publics ou abus de confiance qui pourraient être commis par des personnes physiques dans leur intérêt personnel ou d’autres personnes au détriment de l’association ou d’un tiers extérieur à l’association.
Le législateur a confié au commissaire aux comptes un volet important de sa mission en lui demandant de veiller en permanence à la tenue de la santé financière de l’organisme dans lequel il exerce son mandat.
Si, au cours de sa mission, il a connaissance d’un incident ou d’une situation de difficulté qui risquerait de compromettre l’existence même de l’organisme, il est tenu d’engager une procédure d’alerte. Le devoir d’alerte fait partie de la mission permanente et obligatoire du commissaire aux comptes. C’est pourquoi, il est recommandé, si vous rencontrez des difficultés financières, de dialoguer avec votre commissaire aux comptes. Vous devez partager avec lui les problèmes rencontrés. Son rôle est de vous orienter vers des solutions qu’il est préférable de prendre en amont plutôt que d’attendre qu’il ne soit trop tard.
L’engagement de la procédure d’alerte s’accompagne d’un formalisme qui se concrétise par la tenue régulière de différentes réunions du conseil d’administration, voire de l’assemblée générale au cours desquelles les décisions de sauvegarde seront prises. Dans ces circonstances, votre commissaire aux comptes est à vos côtés pour vous aider à prendre les bonnes décisions et passer ces moments difficiles.
Au-delà de sa mission légale obligatoire, le commissaire aux comptes peut réaliser des services autres que la certification des comptes. En cas de besoin, il pourra, notamment, rédiger et signer des attestations particulières, réaliser des procédures convenues, émettre des rapports de consultations portant sur le contrôle interne et le traitement de l’information comptable et financière, par exemple.
Ces différents documents peuvent vous être demandés par des tiers, bailleurs de fonds ou autres autorités dans le cadre de la vie courante de votre organisme ou de l’évolution de vos projets. Le commissaire aux comptes est, en cette circonstance, un interlocuteur parfaitement désigné car il connait très bien votre association, son organisation et son intimité.
L’expert-comptable exerce une mission contractuelle. Il intervient en qualité de conseil de l’entité. Il élabore les comptes annuels conformément aux textes et règlements comptables. Sa mission d’accompagnement est adaptée aux besoins de l’organisme.
Le commissaire aux comptes exerce une mission légale. Son comportement professionnel s’appuie sur une approche de sécurisation basée sur l’analyse des risques qui entourent l’organisation et le fonctionnement de l’entité. Il exerce un contrôle de la fiabilité des comptes. Il est le garant de la « normalité » en termes de respect des règles par l’organisme au sein duquel il exerce un mandat légal.
Philippe Guay
Expert-comptable, commissaire aux comptes, spécialisé ESS
Philippe est un expert-comptable et commissaire aux comptes qui a accompagné pendant de nombreuses années de multiples associations, fonds et fondations.