Gestion
Date de publication : 24/06/2024
Philippe Guay
Se produire en public, organiser un spectacle, une manifestation sportive, une brocante sont autant d’activités qu’une association peut être amenée à gérer. Qu’il s’agisse de groupes amateurs ou professionnels, d’encadrants salariés ou de bénévoles, il existe des réglementations en matière de manifestations associatives qu’il convient de respecter. Petit tour d’horizon de ces particularités.
Pour une manifestation associative dans un lieu privé, en principe, l’autorisation des pouvoirs publics n’est pas nécessaire (à l’exception des buvettes, foires à tout et activités à risque). Une information doit être effectuée auprès du maire de la commune de l’organisation de la manifestation. Celui-ci peut en effet imposer des mesures pour prévenir les risques d’accidents, de désordre ou de maladie. Les mesures pouvant être prises par le maire sont, par exemple, relatives à une restriction de circulation ou de stationnement, prévention du tapage nocturne, contrôle des denrées alimentaires ou encore, contrôle des accès de secours et des plans d’évacuation en fonction du nombre de participants.
Pour une manifestation associative avec occupation exclusive du domaine public (exemples : occupation exclusive pour un spectacle, foire sur un parking ou même, organisation d’un diner de rue), la demande d’autorisation doit être effectuée au moins deux mois avant la date de la manifestation. Il s’agit d’une demande spécifique dite « permis de stationnement ». Mais, dans la pratique, il est fortement recommandé de s’y prendre beaucoup plus à l’avance.
Pour une manifestation sur la voie publique sans en réserver l’exclusivité (exemples : défilé, courses de vélos, randonnées), une déclaration préalable doit être effectuée auprès du maire de la commune (ou à la préfecture / sous-préfecture dans les communes où est instituée la police d’état) de l’organisation de la manifestation associative au moins trois jours francs avant la date de la manifestation. Cette déclaration n’est pas nécessaire pour les manifestations conformes aux usages locaux comme, par exemple l’organisation d’un carnaval qui existe depuis de nombreuses années. Les sanctions en cas de non-déclaration sont plutôt lourdes (6 mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende).
Dans le cas particulier d’une manifestation associative sur la voie publique sans en réserver l’exclusivité pouvant réunir plus de 1.500 personnes, une déclaration préalable doit être effectuée auprès du maire de la commune de l’organisation de la manifestation au moins un mois avant la date de la manifestation. Cette déclaration doit indiquer les coordonnées de l’association organisatrice, la nature, le lieu, la date, la configuration des installations, le nombre de personnes prévues et les mesures envisagées pour assurer la sécurité du public et des participants. L’autorité de police peut, si elle estime les mesures envisagées insuffisantes, imposer la mise en place d’un service d’ordre ou un renforcement des dispositions prises. L’association est responsable de la sécurité du public et des personnes qui aident à réaliser la manifestation. Elle doit ainsi prévoir l’adéquation et la sécurité du matériel utilisé, la mise en place d’un plan d’évacuation du public, la mise en place d’un service d’ordre voire d’un poste de secours, la déclaration à l’assurance afin de couvrir l’organisation de la manifestation.
Les associations ayant une activité dans le sport savent bien qu’organiser une manifestation sportive peut s’avérer complexe. Des précautions sont à prendre, dans le but de limiter, autant que possible, la responsabilité de l’association et de ses dirigeants. La complexité d’une telle organisation provient de plusieurs dispositifs législatifs qui se superposent à l’occasion d’une manifestation associative sportive. La législation du sport intervient bien entendu, mais également la réglementation sur la diffusion de la musique, celle relative à la vente de boissons alcoolisées, celle concernant l’utilisation éventuelle de la voie publique, la législation des organisateurs de spectacle, etc.
Par ailleurs, la responsabilité peut être engagée compte tenu de la diversité des catégories de personnes participant à une manifestation : les sportifs, le public, les prestataires ou partenaires.
Des dispositions particulières s’appliquent dans ce cas particulier. Toute manifestation sportive devant avoir lieu en totalité ou en partie sur une voie ouverte à la circulation publique doit faire l’objet d’une déclaration préalable auprès de la Préfecture au moins un mois avant la date de la manifestation.
Le dossier de déclaration doit comporter :
Pour toute manifestation ou animation de voie publique, l’organisateur doit souscrire une police d’assurances conforme aux dispositions prévues dans l’arrêté du 20 octobre 1956. Cet arrêté exige la souscription de polices d’assurances spécifiques par les organisateurs d’épreuves ou de compétitions sportives qui se déroulent sur la voie publique. Il garantit au plan de la responsabilité civile tous les risques relatifs à la manifestation projetée, à l’égard notamment de tous les personnels désignés pour l’organisation et le déroulement de cette manifestation, des participants, du public qui y assiste et des ouvrages publics qui pourraient être endommagés.
Pour organiser une telle manifestation, l’association doit être déclarée depuis au moins six mois au Journal Officiel, être affiliée à la fédération qui a reçu délégation pour le sport concerné. Et la compétition doit être inscrite sur le calendrier fédéral et soumise aux dispositions du règlement établi par la fédération nationale. Toute épreuve ou compétition devant se disputer en totalité ou en partie sur une voie ouverte à la circulation publique doit faire l’objet d’une demande d’autorisation administrative préalable auprès de la Préfecture du lieu de départ de l’épreuve six semaines au minimum avant la date de la manifestation.
Est considéré comme entrepreneur de spectacles toute personne qui exerce une activité d’exploitation de lieux de spectacles, de production ou de diffusion de spectacles, quel que soit le mode de gestion, public ou privé, à but lucratif ou non.
Peuvent exercer occasionnellement l’activité d’entrepreneur de spectacles, sans être titulaires d’une licence et dans la limite de six représentations par an :
Les auteurs d’une œuvre sont titulaires sur celle-ci, du seul fait de la création, d’un droit de propriété et d’en tirer un profit pécunier. Au décès de l’auteur, ce droit persiste au bénéfice de ses héritiers pendant les 50 ans (ou 70 ans pour les compositions musicales) qui suivent.
Deux semaines au moins avant le spectacle, celui-ci doit faire l’objet d’une déclaration auprès de l’organisme concerné (en général la SACEM) et acquitter les droits liés à l’exploitation de l’œuvre.
Dans les dix jours suivant le spectacle, l’organisateur devra envoyer à la délégation SACEM le programme des œuvres diffusées, accompagné de l’état des recettes et dépenses.
En ce qui concerne la billetterie, un billet doit être obligatoirement délivré à chaque spectateur provenant d’un carnet à souches ou d’un distributeur informatique et délivré au moment du paiement de la place, avant l’entrée dans la salle.
Les billets doivent être numérotés suivant une suite ininterrompue, utilisés dans l’ordre numérique et porter de façon apparente :
Les associations qui établissent des cafés ou débits de boissons pour la durée des manifestations publiques qu’elles organisent doivent obtenir l’autorisation du maire de la commune.
Ces autorisations sont limitées à cinq par an pour chaque association. Dans ces débits de boissons temporaires ne peuvent être vendues ou offertes que les boissons des deux premiers groupes. S’entendent à ce titre les boissons sans alcool et des boissons fermentées non distillées (vins, bières, cidres, poirés, champagne… à l’exclusion des whiskies, apéritifs et liqueurs). Les installations mises en place doivent respecter certaines zones de protection telles que les édifices religieux, les établissements scolaires ou certains établissements hospitaliers, par exemple.
Dans les enceintes sportives (stades, gymnases, salles d’éducation physique et, d’une manière générale, dans tous les établissements d’activités physiques et sportives), la vente ou la distribution de boissons alcoolisées est strictement interdite.
Le maire peut, par arrêté, accorder des autorisations dérogatoires temporaires d’une durée de 48 heures au plus :
Les cercles privés remplissant les trois conditions suivantes ne sont pas soumis à la réglementation administrative des débits de boissons :
Cependant, ils doivent être installés à distance (déterminée par arrêté préfectoral) de certains édifices (hôpitaux, hospices, maisons de retraite, établissements de prévention ou de cure, des enceintes sportives, écoles…).
Une « foire à la brocante », « vide-greniers », « foire à tout » est une manifestation organisée dans un lieu public ou ouvert au public, en vue de la vente ou de l’échange d’objets mobiliers usagés, d’objets mobiliers acquis de personnes autres que celles qui les fabriquent ou en font commerce. Elle doit être considérée comme une vente au déballage et les mêmes règles de droit lui sont applicables.
Ces manifestations associatives doivent faire l’objet d’une demande d’autorisation préalable. L’autorisation est délivrée par le maire de la commune lorsque la surface affectée à l’opération est inférieure à 300 m². Dans le cas contraire, l’autorisation est délivrée par le préfet.
L’organisateur d’une foire doit tenir un registre permettant l’identification de tous ceux qui offrent à la vente ou à l’échange ces objets. Ce registre doit comporter :
De plus, le registre doit être coté et paraphé par le commissaire de police ou, à défaut, par le maire de la commune du lieu de la manifestation.
Les termes « loto », « loterie », « tombolas » sont relativement proches. Une loterie est un « Jeu de hasard qui consiste à tirer au sort des numéros désignant des billets gagnants et donnant droit à des lots ». Une tombola est une « Loterie où chaque gagnant reçoit un lot en nature ». Par extension, loterie et tombola réfèrent à « ce qui est régi par le hasard ». Un loto est un « Jeu de hasard dans lequel les joueurs sont munis de cartons numérotés dont ils couvrent les cases à mesure que l’on tire d’un sac les numéros correspondants ».
Les lotos ne sont soumis à aucune autorisation préalable mais leur organisation doit se faire dans un cercle restreint, avec un but social, culturel, scientifique, éducatif, sportif, ou d’animation locale. En matière de loterie, et tombolas, l’interdiction est le principe et la loi n’a prévu de dérogation qu’en faveur des loteries de bienfaisance, d’encouragement des arts, ou servant au financement des activités sportives à but non lucratif.
Loteries et tombolas sont soumises à autorisation préalable du préfet, seul titulaire du pouvoir d’accorder de tels agréments.
Les différentes manifestations (tombola, loterie, buvette) permettent à l’association de générer des recettes supplémentaires qui sont en principe soumises aux impôts commerciaux (TVA, impôt société, taxe professionnelle). Mais, si elles ont un caractère exceptionnel, les recettes réalisées à l’occasion de six manifestations organisées dans l’année par une association, à son profit exclusif, sont susceptibles d’être exonérées de tous impôts et taxes (y compris la taxe sur les salaires au cas où des personnes seraient spécialement salariées dans le cadre de ces manifestations).
Afin de bénéficier de cette exonération, l’association doit remplir les critères non lucratifs attachés à son activité principale (gestion désintéressée, activité non concurrentielle…).
Dans ce cas, la comptabilité de l’association doit être organisée de telle sorte qu’elle puisse démontrer, à toute demande de l’administration, les recettes propres à chacune de ces six manifestations. La doctrine fiscale précise qu’une manifestation doit être organisée sur une période courte ou dans une certaine unité de temps (un weekend, par exemple). Mais l’administration considèrera, plutôt, qu’une manifestation qui se déroulerait sur trois weekends différents correspond à trois manifestations.
Avant de vous lancer dans l’organisation d’une manifestation associative, quelle qu’en soit sa nature, il vous est recommandé d’en établir le budget. Même s’il n’a pas de caractère obligatoire, il est essentiel pour s’assurer que la manifestation est financièrement possible et n’entraine pas un déséquilibre de la trésorerie de votre association.
Vous devez prendre en compte :
Face à ces dépenses, l’association devra positionner ses recettes :
Si l’organisation de votre manifestation associative prévoit la remise ou la diffusion de billets d’entrée ou d’accès, il convient que vous mettiez en place un strict suivi de la numérotation de ceux-ci. Le relevé que vous êtes tenus d’établir sert de justification à la principale recette de la manifestation. Dans le cadre d’une kermesse ou d’une manifestation organisée avec plusieurs stands ou plusieurs points de vente, il faut être prévenant car, ce jour-là, de nombreuses opérations se réalisent en numéraire. Il convient de munir chaque stand d’un « fonds de caisse » suffisant et prévoir une caisse centrale destinée à les réapprovisionner en « espèces » en cas de besoin. De même, en fin de manifestation, il convient de responsabiliser chaque responsable de stand pour organiser le comptage, la collecte et le ramassage sécurisé des fonds.
Si vous engagez des artistes ou des musiciens, utilisez le dispositif du GUSO (Guichet unique du spectacle occasionnel) qui est un dispositif de simplification administrative destiné à faciliter l’embauche d’artistes ou de techniciens pour la production de spectacles vivants. Ensuite, la situation personnelle (sociale et fiscale) de l’artiste est centralisée par la caisse d’URSSAF des Artistes et Auteurs.
Si vous diffusez de la musique ou des textes littéraires, réglez les droits d’auteur auprès de votre délégation régionale de la SACEM.
Si vous diffusez des textes littéraires, contactez la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) et la Société des gens de lettres (SGDL). Dans les deux cas, il convient de remplir une demande d’autorisation et vous disposez d’un délai de 30 jours après la manifestation pour régler les droits d’auteur.
Ainsi que nous venons de le voir, l’organisation d’une manifestation par une association est une décision qui ne se prend pas « à la cantonade ». L’opération doit être murement réfléchie et la préparation en être confiée à un comité ou une équipe dédiée. Tous les moyens seront mis en œuvre pour que la réussite soit assurée. De nombreuses associations organisent, chaque année, la même manifestation qui devient un rendez-vous traditionnel inscrit dans l’esprit populaire et local. Cette réussite est certainement due au sérieux de sa préparation. Chaque intervenant doit occuper un rôle parfaitement défini qui lui est attribué. Et, bien entendu, un responsable doit être désigné pour piloter le projet afin que le succès soit au rendez-vous.
Philippe Guay
Expert-comptable, commissaire aux comptes, spécialisé ESS
Philippe est un expert-comptable et commissaire aux comptes qui a accompagné pendant de nombreuses années de multiples associations, fonds et fondations.