Financement
Date de publication : 01/12/2023
Philippe Guay
La subvention publique est un outil de financement fréquent pour les associations et les organismes à but non lucratif. Qui peut verser une subvention publique ? Dans quels types de cas une subvention publique peut-elle être attribuée ? Quelles différences entre concours publics et subventions publiques ? Réponses dans notre article.
En toutes circonstances, l’Etat et les collectivités territoriales restent très proches des associations et des organismes sans but lucratif pour les aider à tenir leur rôle dans le contexte social de la nation. Ainsi, sur les bases des observations conduites régulièrement par différents spécialistes en matières statistiques, on constate que, depuis ces dernières décennies, un peu plus de la moitié du budget des associations est attribué par l’Etat ou des collectivités territoriales. Et, même si le secteur associatif déplore une baisse du niveau des subventions versées par l’Etat, l’ensemble des ressources permet de constater qu’il existe une certaine compensation fournie grâce à l’effort de certaines collectivités territoriales. Ces dernières sont parfaitement conscientes de toute l’importance et du rôle tenu par les associations dans le tissu économique et social au service de nos territoires.
Une subvention publique peut être attribuée par les administrations et organismes suivants :
La subvention publique attribuée aux associations, fondations ou autres organismes sans but lucratif tels que les syndicats et organisation professionnelles, par exemple, est destinée :
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De tous temps, le versement de fonds publics aux associations a alimenté le souci des pouvoirs publics et de leurs représentants en termes de surveillance et de contrôle quant à l’utilisation correcte de ces fonds. Cette préoccupation toute légitime s’est inscrite dans différents textes de lois qui ont évolué avec les modes et pratiques de gouvernance observées sur le secteur.
Il ne faut pas oublier, en effet, qu’en attribuant une subvention à une association, l’Etat et les collectivités territoriales versent de l’argent public à des organismes privés dont la gestion est confiée à des dirigeants bénévoles dont certains sont, parfois, peu ou pas du tout préparés à gérer les budgets aussi conséquents que ceux qui leurs sont attribués. Il est donc normal et nécessaire qu’une réglementation adaptée instaure un contrôle indispensable pour que les pouvoirs publics puissent s’assurer de la bonne utilisation qui est faite des fonds ainsi distribués.
Régulièrement, certains cas d’espèces dénoncent des fraudes et corruptions liées à une utilisation détournée de certaines subventions publiques reçues. Aussi, n’est-il pas surprenant, par exemple, de voir certains amendements ou rapports parlementaires qui suggèrent la mise en place d’un contrôle administratif ou par un commissaire aux comptes de toutes les associations qui reçoivent des subventions publiques et ce, dès le premier euro reçu de l’Etat ou d’une collectivité publique.
Même si aujourd’hui la règlementation établie n’en est pas à ce niveau de sévérité, les contraintes qui s’imposent aux dirigeants des associations qui reçoivent des fonds publics ont pour but de les sensibiliser à l’importance de l’obligation de rendre compte sur ce sujet.
A consulter :
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La loi ESS du 31 juillet 2014 inscrit dans le Code de commerce une définition légale de la notion de subvention publique (article 9-1 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000).
Cette définition était largement sollicitée par les mouvements représentatifs du secteur associatif qui aspiraient à une utilisation plus stable du terme de subvention et de ce qu’il pouvait contenir. Acquise et utilisée par tous depuis bientôt une dizaine d’année, cette définition permet également aux collectivités de bien différencier la notion de subvention publique de celle de commande publique.
La subvention publique est donc une aide de toute nature, c’est-à-dire en numéraire ou en nature, dont le montant est inscrit dans une convention écrite qui est décidée par les autorités administratives définies dans la loi du 12 avril 2000 et qui est justifiée par un intérêt général pour la collectivité qui l’octroie. Cette aide peut répondre à la réalisation d’une action ou d’un projet d’investissement, à la contribution au développement d’activités ou au financement global de l’activité de l’organisme de droit privé bénéficiaire. Ces actions, projets ou activités sont initiés, définis et mis en œuvre par les organismes de droit privé bénéficiaire.
Une précision importante est apportée : ces contributions ne peuvent constituer la rémunération de prestations individualisées répondant aux besoins des autorités ou organismes qui les accordent.
Depuis son homologation introduite fin 2018, le règlement comptable opère une distinction absolue entre la notion de « subvention publique » avec celle de « concours public ».
Un concours public est une contribution financière apportée par une autorité administrative au sens de l’article 1 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000. Par exemple, sont qualifiées de concours publics l’affectation de la taxe d’apprentissage, les ressources issues de la tarification dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux et des établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes relevant du Code de l’action sociale et des familles ou les ressources publiques des établissement sanitaires de droit privé relevant du Code de la santé publique. Les concours publics sont affectés au compte 73 du compte de résultat.
La notion principale qui permet de différencier la subvention du concours public repose sur le caractère obligatoire et réglementaire du concours public car il relève de l’application d’un agrément ou d’un texte qui rend obligatoire le financement octroyé à l’organisme. Alors que le versement d’une subvention publique est soumis au caractère facultatif qui bénéficie à l’autorité ou la collectivité qui décide de son attribution.
Ainsi, par exemple, une subvention peut correspondre à un financement alloué par une commune ou un département pour aider une association à réaliser un projet associatif défini ou récurrent pour lui permettre de financer un investissement ou de couvrir une partie de ses frais habituels de fonctionnement, dès lors que les activités de l’organisme satisfont à un besoin territorial ayant un caractère social, sportif ou d’intérêt général.
Alors que, sont plutôt qualifiés de concours publics, les forfaits d’enseignement reçus par les organismes gérant des écoles, les ressources issues de la tarification dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux et des établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes relevant du Code de l’action sociale et des familles ou les ressources publiques des établissement sanitaires de droit privé relevant du Code de la santé publique.
Pour aller plus loin :
Marché public, délégation de service public et subventions : comment les distinguer ?
La distinction évoquée ci-dessus correspond à une précision fondamentale appliquée de manière réglementaire depuis la réforme du plan comptable des associations et autres organismes sans but lucratif instaurée par le règlement ANC n°2018-06 du 5 décembre 2018. Elle a pour conséquence de clarifier nettement certaines positions doctrinales prises antérieurement et tout particulièrement par la Compagnie nationale des commissaires aux comptes (CNCC), préoccupée par l’appréciation du champ d’application des sommes à prendre en compte pour retenir le seuil déclenchant la mise en place d’une mission légale de certification des comptes.
Ainsi, la CNCC a récemment confirmé que les aides de l’Etat versées pour l’emploi des travailleurs handicapés résultent de l’application d’un processus réglementaire (CNCC- chronique EJ2020-09 – Juillet 2023). Ces aides n’ont donc pas la qualité de subventions publiques au sens de l’article 9-1 de la loi du 12 avril 2000. Elles n’entrent pas dans le champ d’appréciation du seuil de 153.000 euros prévu à l’article L.612-4 du Code de commerce. L’analyse comptable implique que ces aides soient considérées comme des concours publics et imputées au compte 73 du plan comptable. Les attendus de cette chronique précisent bien que le distinguo réside sur le caractère délibéré ou non du financement délivré par l’autorité administrative.
Dès lors qu’il ne s’agit pas de sommes « volontairement et librement décidées » par l’autorité administrative, ces financements sont des « concours publics ». A contrario, si le financement accordé à l’association ou la fondation relève d’un choix délibéré de l’autorité administrative, tant sur son principe que sur son montant, nous sommes bien en présence d’une « subvention publique ».
Il est important que les associations et fondations fassent bien cette distinction car, du raisonnement appliqué, découlent certaines obligations dont les incidences ne sont pas négligeables.
En effet, les organismes qui reçoivent des subventions publiques sont soumis à des obligations particulières lorsque l’ensemble de ces subventions dépasse le seuil de 153.000 euros par an (Code de commerce, Art.612-4). Il doivent :
Les associations et fondations gestionnaires qui reçoivent des concours publics sont, quant à elles, soumises à des contrôles spécifiques attachés au système de tarification dont elles bénéficient.
Alors que de nombreuses associations dénonçaient fréquemment des décalages réguliers de trésorerie entre l’attribution des financements et l’encaissement des sommes allouées, la loi n°2021-875 du 1er juillet 2021, visant à améliorer la trésorerie des associations impose des décisions qui sont destinées à rassurer les dirigeants du secteur associatif.
En effet, depuis cette date, l’autorité administrative ou l’organisme chargé de la gestion d’un service public industriel et commercial qui attribue une subvention doit désormais conclure une convention avec l’association qui en bénéficie, définissant l’objet, le montant, les modalités de versement, les conditions d’utilisation et les modalités de contrôle et d’évaluation de la subvention attribuée. De même, la convention de financement doit définir les conditions dans lesquelles l’organisme, lorsqu’il est à but non lucratif, peut conserver tout ou partie d’une subvention n’ayant pas été intégralement consommée.
Enfin, le délai de paiement de la subvention est fixé à soixante jours à compter de la date de la notification de la décision portant attribution de la subvention. A moins que l’autorité administrative, le cas échéant, n’ait arrêté d’autres dates de versement ou n’ait subordonné le versement à la survenance d’un évènement déterminé.
Ces dispositions conduisent inévitablement à rendre officiel la notion d’excédent raisonnable tant attendue par certaines associations.
Pour en savoir plus :
La comptabilisation des subventions publiques
Philippe Guay
Expert-comptable, commissaire aux comptes, spécialisé ESS
Philippe est un expert-comptable et commissaire aux comptes qui a accompagné pendant de nombreuses années de multiples associations, fonds et fondations.