Gestion
Date de publication : 18/06/2025
Arcel Fouman
Le pilotage d’une organisation est un enjeu essentiel pour assurer sa pérennité. Il s’agit d’un processus qui repose sur des actions opérationnelles et stratégiques et qui requiert une information actualisée et des outils adaptés. Malgré leurs spécificités, les entités de l’économie sociale solidaire (ESS) requièrent également une gestion optimale. Elle est d’autant plus prégnante dans un contexte de crise auquel elles sont exposées ces dernières années. Le Conseil Economique, social et Environnemental indiquait lors de son avis rendu le 26 mai 2024 que « les subventions publiques constituaient en moyenne 34 % des financements des associations en 2005 (mais plus de 75 % pour celles agissant pour la défense des droits et des causes, la culture et le sport), elles n’en représentent plus aujourd’hui en moyenne que 20% ».
Dans ce contexte, ces entités ont plus que jamais besoin d’outils permettant d’assurer une gestion optimale de leurs activités et de leur patrimoine. Les comptes annuels sont, dans la majorité des cas, l’outil qui permet d’apprécier la réalité de l’activité tout au long de l’exercice. Alors que le pilotage nécessite une information actualisée et régulière pour mieux adapter son action au quotidien. Ainsi, quel est l’apport de la situation intermédiaire pour réduire le manque de visibilité sur l’activité des entités de l’ESS ? Par quels moyens la situation intermédiaire peut-elle contribuer à l’efficacité du pilotage des entités de l’ESS ? Quels sont les avantages d’un accompagnement par l’expert-comptable au suivi de son activité ?
Pour adapter le pilotage de sa structure à son environnement, le dirigeant a besoins d’outils de gestion et de suivi fiables. L’accompagnement de l’expert-comptable peut se faire au travers d’outils mis à la disposition du client dans la cadre d’une situation intermédiaire. Contrairement aux états financiers en fin d’exercice imposés à certaines entités de l’ESS, les situations intermédiaires ne sont pas obligatoires. Elles sont le fruit d’un consentement mutuel et peuvent intervenir à la convenance du client. Mais elles permettent aux gestionnaires (directeur, trésorier, président) de mieux suivre leurs activités et d’adapter les actions et la stratégie afin d’atteindre les objectifs qui leur ont été fixés. Il est courant d’établir des situations à la fin d’un trimestre ou d’un semestre par exemple. La situation intermédiaire est un bilan établi au cours de l’exercice mais qui respecte les mêmes principes comptables que le bilan annuel. Elle donne par conséquent une image sincère et fidèle de l’activité et du patrimoine de l’entité. Ce point d’étape proposé par l’expert-comptable offre des avantages considérables.
La situation intermédiaire permet de faire un état sur l’activité en application des principes comptables. C’est l’occasion de faire un état détaillé de tout ce qui s’est passé depuis le début de l’exercice et qui impacterait le résultat et le patrimoine de l’association. Elle participe à l’amélioration de la gestion en fournissant des outils d’aide à la décision opérationnelle et stratégique. D’autre part, elle participe à l’amélioration de l’image de l’association et son adaptation aux contraintes règlementaires tout en participant à la préparation des comptes annuels.
Elle permet de vérifier et d’évaluer tous les comptes en respectant entre autres les principes de permanence des méthodes, d’indépendance des exercices, de prudence voire de continuité d’exploitation. L’application de ces principes a un impact important sur le résultat de l’entité. Par exemple, le principe d’indépendance des exercices impose que les produits et charges soient rattachés aux exercices auxquels ils sont réalisés. Ainsi, l’évaluation des produits constatés d’avance ou des charges constatées d’avance permet une meilleure appréciation de l’activité. La situation intermédiaire fournit l’information qui permet de mieux apprécier la capacité de l’association à atteindre les objectifs fixés au début de l’exercice. L’information actualisée par exemple sur la consommation du budget de chaque poste de dépense permet de sensibiliser sur la nécessité de maitrise des coûts. L’information sur la réalité d’utilisation du budget peut donc être transmise aux responsables de ces dépenses. Elle participe donc au contrôle budgétaire en comparant le prévisionnel au réalisé. Cette information n’est pas toujours celle dont dispose le dirigeant parce qu’il ne déploie pas les principes comptables dans son activité quotidienne.
La situation intermédiaire participe à l’évaluation des pratiques des différents comptes et donc de leurs risques. L’expert-comptable, dispose de capacités nécessaires à la réalisation une évaluation de la trésorerie de l’association. L’évaluation faite par exemple des disponibilités, des valeurs mobilières de placements d’une part, des créances clients et dettes fournisseurs et bancaires d’autre part sur le bilan de la situation permet au dirigeant d’avoir une idée actualisée du besoin en fonds de roulement. Les outils qui composent la situation intermédiaire permettront par conséquent au dirigeant d’adapter sa gestion. Compte-tenu du résultat de cette évaluation l’entité peut alors mettre en place des outils qui permettent d’optimiser cette trésorerie. Il est possible, lorsque l’organisation dispose de beaucoup de trésorerie, de mettre en place des produits de placement de cette trésorerie. Dans ce cas, les instruments tels que les comptes à terme sont intéressants pour l’association.
A contrario, lorsque la situation de trésorerie qui ressort du bilan intermédiaire est plus complexe, l’association doit procéder à un pilotage optimal. Il est possible d’activer par exemple les leviers tels que l’amélioration du recouvrement des créances clients, de subventions. La revue des délais de paiements des fournisseurs favorise également la situation de trésorerie de l’association. En plus de favoriser la gestion de la trésorerie l’information donnée peut favoriser la réalisation de produits ou de réduction de la charge financière. Un meilleur suivi de la trésorerie permettrait alors de réaliser des placements qui rapportent des produits financiers. Une autre conséquence positive d’un meilleur suivi de la trésorerie permet de limiter l’endettement et par ricochet de réduire la charge financière qui y est occasionnée.
Son caractère contractuel permet au dirigeant d’obtenir l’outil qui répond de manière précise à son besoin. Il peut donc demander au-delà des documents de référence habituels, des outils qui concourent à l’optimisation de la gestion opérationnelle. Les informations données par la situation intermédiaire peuvent contribuer au dynamisme de l’entité. La restitution de l’information est alors faite par le biais, notamment, du compte de résultat qui donne une idée de l’évolution de l’activité de l’entité. Les résultats portent à la fois sur les indicateurs quantitatifs et qualitatifs. Ils peuvent avoir pour impact de favoriser la mise en place d’actions permettant de réagir au vu des résultats affichés. Il est possible de mettre en place des communications internes, des entretiens auprès du personnel voire une revue des objectifs auprès des équipes.
De la même manière, le bilan intermédiaire donne une situation à mi-parcours du patrimoine de la structure. En s’intéressant à chaque compte, le dirigeant dispose d’une information qui permet de réagir avant la fin d’année. Il est possible de mettre en place par exemple un tableau de bord pour un meilleur suivi. En effet, un tableau de suivi des créances et de recouvrement peut-être un outil adéquat à l’action d’amélioration des encaissements mise en place par l’association.
La gestion étant à la fois faite de décisions opérationnelles et stratégiques, la situation intermédiaire peut également être un outil d’aide à cette décision stratégique. Une fois que la direction dispose de l’information, elle peut prendre des décisions stratégiques. Une décision est dite stratégique lorsqu’elle engage l’association sur le long-terme et porte notamment sur l’allocation de ressources. Le caractère engageant justifie la nécessité du fondement d’une telle décision sur une information fiable et actualisée. Les informations issues de la situation intermédiaire peuvent être une aide pour une prise d’une décision stratégique.
En période d’augmentation d’activité, la décision de recrutement d’un nouveau salarié devrait être confortée par les données chiffrées actualisée. Cette décision qui affecte les ressources et l’augmentation des moyens de l’association serait justifiée si l’élément qui favorise sa prise est actualisée. En reprenant l’exemple de l’embauche d’un nouveau salarié, si cette décision a été envisagée, la situation intermédiaire peut confirmer ou infirmer si la hausse d’activité est toujours d’actualité. La décision prise serait donc justifiée et éclairée.
L’exhaustivité des contrôles déployés par l’expert-comptable permet de cartographier les risques opérationnels et stratégiques auxquels s’expose l’entité. Ces risques peuvent donc être anticipés et des plans d’actions peuvent être adoptés. Le tableau de bord est l’outil qui répond le mieux aux objectifs d’aide à la décision. En effet, il permet de sensibiliser les dirigeants sur les opérations réalisées en fournissant une information synthétique. Il fournit une opinion sur l’activité et la situation financière d’une association et par conséquent donne une tendance sur l’atterrissage avance la clôture de l’exercice. Enfin, le tableau de bord permet de rassurer les parties prenantes externes en attendant les comptes annuels.
L’information délivrée par la situation intermédiaire n’est pas toujours et exclusivement destinée aux représentants de l’association. Elle peut être utilisée à différentes fins et transmise à des partenaires extérieurs à l’association. Cette information peut se révéler davantage importante pour les tiers des associations qui bénéficient de financements publics. Même si la demande est souvent faite par la direction, la situation intermédiaire peut favoriser l’amélioration de l’image de l’association auprès des partenaires. Elle est adressée aux banques pour obtenir le financement de projets. Elle peut être destinée aux financeurs et autres parties prenantes pour justifier de la gestion faite des fonds reçus. Cette transparence est appréciée d’autant plus qu’il s’agit d’un travail réalisé par un professionnel indépendant qui engage sa responsabilité. L’image de transparence offerte par la situation peut même être à l’origine de la demande expresse d’un tiers à l’association.
La situation intermédiaire repose sur les mêmes principes et procédés qui gouvernent la révision des comptes annuels. Elle participe par conséquent à la préparation des comptes annuels. La mise en œuvre des principes comptables, la révision sur la base de justificatifs légaux sur le plan comptable, sont autant d’indicateurs et d’éléments qui viendront réduire la charge de travail à réaliser au moment de l’établissement des comptes en fin d’exercice. Lorsque la situation est faite, les éléments justificatifs par exemple doivent être portés sur les cycles concernés comme s’il s’agissait d’un travail de révision en fin d’exercice.
Les notes de comptes portées pour justifier les mouvements lors de la situation permettront de justifier les comptes annuels lorsqu’ils sont définitifs. De la même manière, les diligences réalisées sur la période révisée permettent de réduire le travail en fin d’exercice. C’est par exemple l’occasion de demander des justificatifs tels que les contrats de crédits, les conventions à l’association. Ces éléments ne seront plus demandés par conséquent lors de la révision des comptes annuels.
La gestion de l’association nécessite le déploiement de diverses règles. Il est parfois nécessaire de faire un état de cette gestion pour identifier les failles à ces règles de gestion. La situation intermédiaire a l’avantage de répondre à la conformité aux règles de divers domaines tels que la fiscalité, la comptabilité, le droit des obligations voire le droit commercial. Elle constitue en ce sens un dispositif d’évaluation des pratiques de l’association vis-à-vis de ces règles. Cette vérification est d’autant plus intéressante qu’elle est réalisée par un tiers professionnel dont la compétence exige la connaissance de ces règles.
Cette information permet alors de remettre en cause les pratiques faites et d’adopter des actions en conformité avec la règlementation en vigueur. Il est même possible que l’information favorise la mise en place de manière proactive d’actions en conformité avec les règlementations futures. Le caractère proactif des diligences de l’expert-comptable va au-delà de l’analyse de l’activité. La situation intermédiaire est l’occasion de sensibiliser le dirigeant sur le format des comptes en prévision, par exemple, du changement de plan comptable qui a été mis en place à compter des exercices ouverts au 1er janvier 2025.
La situation intermédiaire est une occasion d’évaluer l’opérationnalité et la mise en conformité de l’association vis-à-vis de règles qui lui sont applicables. La gestion de la facturation électronique est un exemple concret d’un suivi à réaliser au cours de l’année.
La situation comptable intermédiaire n’étant pas une obligation légale, elle n’est pas un réflexe pour les dirigeants d’associations. Or, elle offre un panel d’outils de pilotage et de suivi qui permettent d’orienter l’activité et d’améliorer la gestion du patrimoine des associations. Pour piloter une association, le dirigeant a besoin d’une information actualisée et fiable. Cette information lui permettra de mettre en place des actions opérationnelles et stratégiques pour parvenir aux résultats fixés. Elle permet également de mieux suivre et réagir, compte tenu de sa situation de trésorerie et de la conformité avec les différentes règlementations qui s’imposent à son activité. Par ailleurs, elle constitue un facteur d’amélioration de la transparence en communiquant une information actualisée des comptes de l’association. Le rôle, le professionnalisme et la responsabilité de l’expert-comptable dans l’établissement de la situation intermédiaire sont des préalables essentiels. Ainsi, quels seraient les risques des comptes intermédiaires qui ne reflètent pas la réalité de l’association ?