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Le pouvoir de licencier dans les associations

Date de publication : 09/12/2022

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Il n’est pas toujours simple d’identifier l’organe compétent pour prononcer le licenciement d’un salarié d’une association. Pourtant la question du pouvoir de licencier dans les associations est essentielle puisque le licenciement prononcé par un organe ou un collaborateur qui n’en aurait pas le pouvoir sera déclaré sans cause réelle et sérieuse par les tribunaux, obligeant ainsi l’association à indemniser le salarié.

Qui est compétent pour licencier dans une association ?

La question de l’organe compétent pour licencier un salarié dans une association fait l’objet d’un abondant contentieux. Raison pour laquelle la Cour de cassation a régulièrement l’occasion non seulement de rappeler les principes applicables mais également d’apporter des précisions utiles.

Le principe : la compétence du président, sauf précision contraire des statuts

Rappelons, tout d’abord que, dans une association, le pouvoir de licencier un salarié appartient, en principe, à son président.

Seuls les statuts de l’association peuvent attribuer cette compétence à un autre organe comme le conseil d’administration, le bureau ou un comité directeur. Dans cette hypothèse, le président perd son pouvoir de licencier au profit de l’organe désigné par les statuts.

Que faire dans le silence des statuts sur le pouvoir de licencier ?

Par ailleurs, lorsque les statuts d’une association ne comportent aucune disposition sur le licenciement mais accordent à un organe le pouvoir de recruter, la règle dite du « parallélisme des formes » veut que ce soit cet organe qui dispose du pouvoir de licencier. Ainsi, lorsque, selon les statuts associatifs, le conseil d’administration nomme le directeur de l’association, il est également compétent pour le licencier. Dès lors, le licenciement prononcé par le président de l’association n’est pas valable. (Cassation sociale, 9 septembre 2020, n° 18-18810)

Il faut noter que pour destituer le président de son pouvoir de licencier, les statuts associatifs doivent contenir une disposition spécifique sur le pouvoir de recruter ou de licencier. Ce qui n’est pas le cas des formulations trop générales.

Ainsi, selon la Cour de cassation, ne confèrent pas le pouvoir de licencier au conseil d’administration les statuts qui prévoient que ce dernier est « investi des pouvoirs les plus étendus, pour autoriser tous actes qui ne sont pas réservés à l’assemblée générale » et notamment « surveille la gestion des membres du bureau, se fait rendre compte de leurs actes, autorise tous achats, crée les postes nécessaires au fonctionnement de l’association et peut consentir toute délégation de pouvoirs pour une question déterminée et un terme limité ». Dans ces circonstances, le président conserve donc le pouvoir de licencier. (Cassation sociale, 6 novembre 2019, n° 18-22158)

Il en est de même des statuts associatifs selon lesquels le conseil d’administration « est investi des pouvoirs les plus étendus pour gérer, diriger et administrer l’association sous réserve de ceux statutairement réservés aux assemblées générales ». Là encore, le président garde son pouvoir de licencier. (Cassation sociale, 14 octobre 2020, n° 19-18.574)

A lire aussi :
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Peut-on déléguer le pouvoir de licencier dans une association ?

Le titulaire du pouvoir de licencier, et lui seul, peut déléguer cette prérogative à un autre collaborateur (responsable de la gestion du personnel, directeur général, directeur des ressources humaines, directeur d’établissement…).

À noter : si, en théorie, une délégation de pouvoirs peut être orale, en pratique, un écrit est nous parait indispensable car il permet d’apporter la preuve de l’existence de la délégation et de son périmètre.

La condition liée aux statuts

D’abord, les statuts ou le règlement intérieur de l’association ne doivent comporter aucune disposition interdisant de déléguer ou limitant cette délégation du pouvoir de licencier. Ainsi, pour la Cour de cassation, le règlement intérieur qui permet au président de déléguer une partie de ses pouvoirs mais qui limite cette délégation « aux actes de gestion courante administrative ou financière, en particulier aux activités opérationnelles, administratives et financières nécessaires à la bonne marche quotidienne » de l’organisme « ainsi qu’aux mesures nécessaires à la préparation des décisions du conseil d’administration, du bureau et du président » ne l’autorise pas à transférer son pouvoir de licencier au directeur général. (Cassation sociale, 17 mars 2016, n° 14-18415)

Lorsque les statuts ou le règlement intérieur fixent des conditions de délégation (accord préalable du conseil d’administration, durée limitée, etc.), l’organe qui souhaite déléguer son pouvoir de licencier doit s’y conformer. De plus, lorsque les statuts indiquent que le président de l’association peut déléguer ses pouvoirs dans les conditions fixées par le règlement intérieur, la délégation de pouvoirs est valable seulement si ce règlement intérieur existe.

Les conditions liées à la délégation elle-même

Ensuite, cette délégation du pouvoir de licencier dans l’association doit être expresse. Ainsi, elle ne peut pas, par exemple, être déduite des compétences mentionnées dans le contrat de travail d’un chef d’établissement, quand bien même ce contrat accorde à ce dernier la mission de procéder, en accord avec le président de l’association, aux licenciements. (Cassation sociale, 13 mars 2019, n° 17-22488)

De même, ne constituent pas une délégation de pouvoirs valable le procès-verbal de nomination d’un directeur général précisant que sa fonction inclut la direction du personnel et le contrat de travail mentionnant dans ses fonctions la gestion du personnel, le pouvoir d’embaucher et le pouvoir disciplinaire. (Cassation sociale, 21 septembre 2017, n° 16-10305)

Enfin, l’acte de délégation doit mentionner précisément le transfert de la compétence de licencier. Ce qui n’est pas le cas d’une délégation de pouvoirs rédigée en des termes trop imprécis ou trop généraux.

Ainsi, pour la Cour de cassation, ne confère pas le pouvoir de licencier au directeur général la délégation de pouvoirs selon laquelle le président transfère à ce dernier « ses pouvoirs et attributions en matière de gestion administrative de l’association » et qui indique que le directeur général a « autorité sur l’ensemble du personnel » et est « responsable des éventuels manquements des salariés qui lui sont directement rattachés ». (Cassation sociale, 17 octobre 2018, n° 17-13268)

Replay : la délégation de pouvoir et de signature dans les associations

Quelle est la sanction en cas de licenciement prononcé par une personne n’en ayant pas le pouvoir ?

Attention : le licenciement prononcé par un organe qui ne dispose pas du pouvoir de licencier ou par un collaborateur qui a reçu une délégation de pouvoirs irrégulière ne peut pas être régularisé par un second licenciement prononcé cette fois par l’organe compétent. Ce licenciement sera considéré comme étant sans cause réelle et sérieuse par les tribunaux. Ce qui obligera l’association à verser des indemnités au salarié.

A lire aussi :
La rupture conventionnelle homologuée du contrat de travail

Conclusion

En conclusion, deux conditions essentielles pour sécuriser les actes de licenciement dans une association :

  • Vérifier les conditions prévues dans les statuts, et le cas échéant, les modifier,
  • Prévoir une délégation expresse de ce pouvoir auprès du délégataire choisi par le président de l’entité

En l’absence de conditions spécifiques, le président demeurera le seul autorisé à engager et valider une procédure de licenciement.

A lire :
Délégation de pouvoirs dans une association

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